En 100 ans, les zones humides qui
représentaient 30% du territoire régional ont
été ramené à 1% de ce
même territoire.
La
disparition de ces zones humides est due à l'urbanisation,
à l'agriculture intensive mais également
à des grands travaux d'aménagements du territoire
comme l'assèchement de marais (plaine de l'Aa par exemple)
ou à la canalisation de fleuves et de rivières
qui n'ont plus leurs zones d'expansion de crue naturelles (Escaut par
exemple). Parallèlement, l'exploitation industrielle de la
région a amené la création de nouveaux
types de zones humides avec les étangs d'affaissement minier
par exemple (comme la Mare à Goriaut).
En
ville, généralement on a canalisé des
rivières et leurs berges sont
minéralisées. Non seulement elles ne
présentent plus la végétation
aquatique, les reliefs en pente douce, le système racinaire
de grands arbres de bords d'eau (aulnes glutineux, saules) dans
lesquels poissons, oiseaux, batraciens pouvaient se reproduire mais de
plus, les rares mammifères en présence ne peuvent
plus venir boire sans risquer de se noyer.
Elles
ont également reçu longtemps sans
précaution les rejets industriels ou ménagers.
Leurs eaux souvent ne présentent plus les
qualités biologiques qui permettent une vie
diversifiée.
Par
ailleurs, dans des villes anciennes, on trouvait encore
voilà 50 ans des réseaux de mares ou de
fossés. Nombre d'entre eux ont été
comblés aujourd'hui, pour gagner de la place, avec les
nouveaux besoins de parking par exemple, chez les particuliers.
Tous les
insectes , invertébrés et micro organismes
liés aux milieux aquatiques et premiers maillons de larges
chaînes alimentaires ont vu leurs populations s'effondrer
avec la disparition de leur milieu d'accueil : libellules,
trichoptères. Leurs prédateurs, ont vu
leurs conditions de vie, de fait, se dégrader et
entraîner leur propre disparition : crapaud commun,
grenouille verte, triton, hirondelle des fenêtres,
chauve-souris, hérisson, tous très
grands consommateurs de cette micro faune.
Autrefois
présents en ville, ces populations animales ont quasi
disparu sauf à rencontrer localement des
initiatives qui leur sont favorables. Comme pour le
martin-pêcheur
qui a besoin de berges terreuses hautes pour creuser son nid, ou le
foulque macroule, le grèbe
huppé, le colvert…
qui nidifient dans des plantes hautes de bords d’eau que sont
les roseaux, joncs, iris, massettes… Tous ont
démontré déjà leur
capacité de subsistance en milieux urbains. On devrait
pouvoir les voir mieux s'y épanouir...
En
ville, les prairies ont souvent disparu en raison d'une
volonté de contrôle du
végétal
dont la
spontanéité effraie et l'on a vu se
développer à l'envie des hectares de gazon
ras. Or, certaines espèces
végétales ne peuvent s’exprimer lorsque
les espaces font l’objet d’un entretien trop
intensif (tonte et fauche). Sur l'ensemble de nos territoires, les
surfaces dédiées aux prairies sont notamment
très réduites par rapport au début du
XXè siècle, ce qui condamne tout un lot de
plantes printanières ou estivales qui ne voient jamais le
jour, et avec elles le lot d’insectes et d’animaux
qui leur sont inféodés. Des efforts sont faits aujourd’hui
en matière d’entretien écologique des
espaces publics en ville notamment avec la mise en place de la gestion
différenciée des espaces verts (cf,
mission gestion différenciée) de certaines communes, ou de bord de
routes. Cette gestion nous fait redécouvrir de nouveaux
paysages urbains, parsemés de prairies hautes. Leurs fauches
se font une ou deux fois l’an, ce qui laisse le
temps aux plantes de prairies de réaliser
leurs cycles naturels. Parmi les belles endormies qui se
réveillent ainsi, on retrouve notamment des
d’orchidées mais aussi des fleurs toutes simples
comme la
carotte sauvage,
l'achillée
mille-feuille, la
grande berce, le bouillon blanc. Et
ainsi, paradoxalement, c'est en ville que les apiculteurs peuvent
récolter le meilleur miel, au regard du moindre usage
d'insecticides et de pesticides dont par ailleurs pâtissent
les zones agricoles.
En
matière d'espaces forestiers, la région dispose
du plus petit taux de boisement national (soit 6% !!). Ce qui incite à
regarder, en ville, comme à la campagne, le plus petit arbre
ou bosquet avec le plus grand respect. La faune qui y trouve refuge
(pic-épeiche, grimperau...) y est en sursis !!
Les milieux de rocaille
de substitution en ville ont diminué depuis le
siècle dernier, alors que le minéral s'est
particulièrement dévelopé.
Il existe en effet
en milieu naturel un besoin en cavités minérales
(trous en falaises, grottes, tas de pierres...) que la faune avait
remplacé en ville par celles liées à
l'habitat de l’homme. Trous et failles dans les
murs, niches dans des éléments
d’ornementation de façades, espaces sous les
tuiles…Or, aujourd’hui, les constructions neuves
présentent moins de prises. Lisses et plates, elles ne
répondent à ces fonctions. Par ailleurs, les
milieux de rocaille naturels sont très largement
végétalisés et ce qui n'est pas le cas
de notre bâti urbain, qui donc a perdu les qualité
d'un milieu de rocaille de substitution.
Ce n'est pas
tant que la quantité de haies ait diminué en
ville, mais leur qualité s'est considérablement
dégradée. Il
suffit pour cela de
regarder les entrelacs de petits jardins, les zones industrielles ou
les squares urbains tous entourés de haies de petits
conifères (thuyas) ou d'arbustes au feuillage persistant
(laurier horticole, aucuba, cotonéasters...). Mais ces
plantes ne sont pas régionales, elles n'existent pas
toujours à l'état sauvage (sont donc parfois le
résultat d'une sélection
génétique) et donc sont rarement utiles
à la faune locale. Les invertébrés par
exemple ont du mal à décomposer leurs feuilles et
leurs bois, auxquels ils ne sont pas adaptés. Les oiseaux
n'y trouveront pas les graines ou les baies desquelles ils se
nourrissent. Leur floraison n'apportera pas de quantité de
pollen suffisante... A ces arbustes ornementaux, il faudrait
préférer les arbustes bocagers, ceux qui forment
les haies des territoires ruraux, adaptés à la
faune et à la flore locales, qui constituent
véritablement les ressources pour des haies vivantes :
prunellier, aubépine, noisetier, fusain,
églantier, bourdaine, charme ou saule têtards...
Autres habitats naturels en voie de disparition
notamment en ville, le bois mort et les cavités naturelles.
Le premier est un milieu
vital car ressource d'un des premiers maillons des chaînes
alimentaires : les insectes se nourissant de bois mort et/ou vivant
(insectes xylophages) ou strictiment de bois mort (insectes
saproxylophages), qui ont pour mission depuis la nuit des temps, de
décomposer ce bois mort, de le transformer en humus, comme ils le font
en milieu naturel. Or, que ce soit dans les bois, les parcs urbains ou
dans les jardins des particuliers, les pratiques d’entretien
des espaces amènent à abattre les arbres morts ou
à ramasser les branchages tombés à
terre, à ne rien laisser traîner. Alors
qu’on peut laisser un simple tas de bois bien
rangé dans un coin qui ne donnera pas une allure de
laisser-aller et qui remplira parfaitement cette fonction
écologique indispensable. Pour autant, il faut
reconnaître qu’aujourd’hui les
responsables de gestion des espaces verts ou des espaces forestiers,
prennent cet élément en compte. Vos promenades
vous amèneront à croiser tas de bois, troncs
d’arbres débités mais
laissés sur place ou encore bois mort sur pied. Vous saurez
que c’est volontaire et n’hésitez pas
à faire de même chez vous. Les cavités naturelles, on les
trouve dans le bois justement, et surtout dans les arbres. Elles
apparaissent naturellement au cours du processus de vieillissement avec
la perte d’une branche, ou l’apparition
d’un nœud mais elles sont aussi
favorisées par le travail permanent des oiseaux qui piquent
avec leur bec pour se construire un nid (les pics) ou à la
recherche des insectes comme des larves par exemple et par le travail
de ces dernières qui se faufilent dans toutes les failles de
l'écorce. Ce traitement agrandit inlassablement les petits
interstices qui apparaissant sur les parties mortes d’un
arbre, par ailleurs en pleine santé, mais dont la ramure se
renouvelle naturellement.
La chasse à l'ortie dans nos jardins et
nos espaces verts entraînent la fragilisation de plusieurs
espèces de papillons qui sont totalement
dépendantes de ces plantes dans lesquelles elles se
reproduisent. En ville, cette plante est presque
pourchassée, et là encore, par ricochet, ce sont
ces papillons qui en sont exclus. Les friches constituent le plus
souvent les rares espaces qui peuvent encore leur offrir cet accueil et
sur lesquels on trouvera alors le paon du jour, le machaon et la carte géographique
par exemple.
Par exemple, les populations d'hirondelles des
fenêtres ont chuté de plus de 80% en quinze ans car leurs nids (qu’elles construisent en
petites boulettes d’argile à l’angle des
fenêtres) ont été en grande partie
détruits par des habitants qui ne voulaient plus de cette
promiscuité. C’est également
dû, notamment dans les villes, aux sols artificiels (bitume,
pavés…) qui recouvrent les rues, trottoirs et
places, et qui ne permettent pas que se forment des flaques de boues
dans lesquelles cet oiseau va prélever sa matière
première de construction, garantie
éco-matériau. Enfin, la disparition progressive
des mares, étangs, petites zones humides qui apportent leur
cortège d’insectes, prive de nombreux oiseaux,
comme les hirondelles, d’une nourriture de choix.
Le
crapaud commun, la grenouille verte... sont en voie de disparition en
région et ont quasi déserté les
milieux urbains, alors que voilà quelques dizaines
d'années, des réseaux anciens de mares avaient
permis qu'ils s'y maintiennent. La disparition de ces zones humides est
la principale raison de leur raréfaction ainsi que les
obstacles qui se sont multipliés entre leur zone
d'hibernation (un tas de feuille en bosquet forestier par exemple) et
leur lieu de reproduction en période des amours (les mares
qui ont vu leur naissance). Pour éviter les massacres que
ces micro migrations engendrent sur les routes, on conçoit
désormais des crapauducs ou on interdit la circulation
quelques jours sur certaines voieries.
Le moineau
domestique a vu ses populations diminuer de plus de 60% sur les 20
dernières années (certains chiffres sont beaucoup
plus alarmants). Ce petit animal cavernicole, dont le voisinage est
pour nous une habitude ancrée, pourrait très bien
ne plus accompagner nos trajets quotidiens. On évoque entre
autres la diminution de l'offre de graines (surface de gazon en lieu et
place de prairie, haies horticoles au lieu des haies
bocagères) et d'habitats carvernicoles, ainsi que la
concurrence d'autres espèces urbaines (pigeons notamment).
Les abeilles et
autres insectes pollinisateurs voient également
leurs populations s'effondrer. Parmi les principaux responsables, on
désigne les insecticides. Ensuite, la diminution de surface
des prairies qui offraient leurs tapis de plantes
nectarifères, locales, adaptées à
l'entomofaune de notre région est aussi
considérée comme une cause de leur disparition.
L'introduction de nombreuses plantes horticoles, ou
d'espèces végétales non
adaptées aux besoins des espèces animales locales
conduit aussi à leur raréfaction (citons
notamment les thuyas, aucubas, lauriers horticoles
fréquemment utilisées dans nos parcs et jardins).
Les chauve-souris
(19 espèces en région dont les 2/3 environ
peuvent s'être adaptées au milieu urbain) sont
toutes menacées. L'accès aux caves
qui sont pour elles des lieux d'hibernation est rendu de plus en plus
difficile (grillage), les toitures en tuile se raréfient
alors qu'elles leur permettaient de développer, entre la
tuile et l'ossature bois, des espaces de nidification. Elles sont
également victimes de certains traitements chimiques du bois
et des matériaux et enfin, la diminution du volume global
d'insectes volants (en raison de la disparition des zones humides et
des espaces végétalisés)
réduit considérablement leurs ressources
alimentaires.
Autre
exemple, l’effraie
des clochers, plus courante en milieu rural (mais milieu rural
habité) niche dans des constructions couvertes comme les
clochers. Elle
voit également son habitat
disparaître. Grillages ou fermeture
empêchent désormais souvent
l’accès à ces refuges or ces
protections sont la plupart du temps mises pour empêcher des
invasions de pigeons. L’effraie en pâtit la
première, alors qu’il est possible
d’aménager des passages
« sélectifs » qui
laissent à l’extérieur les
indésirables. De plus, pour que ce magnifique rapace puisse
s’établir, il lui faut trouver à
proximité un terrain de chasse adapté. Elle ne
chasse pas en forêt comme certains de ses cousins, il lui
faut trouver des prairies ouvertes dans lesquelles courent les
campagnols et les lérots. Malheureusement, les champs
cultivés par une agriculture intensive, n’offrent
plus à ces petits mammifères, le gîte
et le couvert nécessaires. Ils n’y trouvent pas de
haies pour s’abriter, d’insectes ou de graines
à dévorer en raison des traitements chimiques
utilisés et donc pas de possibilité de vivre. Et
par ricochet, c’est l’ensemble de la
chaîne alimentaire qui en est affectée, donc
l’effraie, mais bien d’autres de leurs
prédateurs également. Les rapaces nocturnes (hiboux moyen duc, chouette hulotte...) sont
particulièrement fragilisés. Ils avaient leur
place en ville, en milieu moyennement dense type
périphérie urbaine, malheureusement on les y
rencontre de moins en moins alors que leur qualité de
prédateur pourrait servir à réguler
notamment des espèces invasives dont nous nous plaignions.
Quelques fois, le long des cimetières urbains, on entend
encore hululer la chouette hulotte.
Les listes des espèces et des habitats
naturels en raréfaction, quelques fois en disparition, est
longue. Le
Muséum National d'Histoire Naturelle (www.mnhn.fr)
comme l'UICN (www.uicn.fr)
sont parmi les référents scientifiques qui les
tiennent à jour. Si, chaque fragilisation
d'espèce est un cas particulier, les raisons de ces
états de faits sont partout semblables, liées
à nos modes de vie, d'exploitation et d’occupation
du territoire.
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